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André Beucler
écrivain français
1898 - 1985

Regards sur une vie
(jalons biographiques)

Deuxième partie

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Autobiographie 1957
Notes autobiographiques 1960

Biographie Première partie
Biographie Deuxième partie
Biographie Troisième partie

1925 - 1930 Les années glorieuses Au centre de la modernité littéraire
1929 - 1934 Les années fastes Du cinéma au grand reportage
1934 - 1939 Le recueillement L’essayiste et le traducteur

1925 - 1930
Les années glorieuses
Au centre de la modernité littéraire

Il écrit, cependant, et dès 1923 publie dans La Revue de Bourgogne, éditée par le prestigieux imprimeur Maurice Darantière : contes, nouvelles, poèmes et même un scénario, Le Dernier Jour, qui obtient le premier prix d’un concours organisé à Hollywood par Maurice Tourneur. Ses textes sont remarqués par Marcel Azaïs, grand découvreur, qui en fait l’éloge.

La ville anonyme - 1925

En 1925 André Beucler fait avec éclat son entrée dans la République des Lettres. Gaston Gallimard le prend sous contrat. En mai parait son premier livre : La Ville anonyme. En juillet la Nouvelle Revue Française accueille, entre Rilke, Proust et Gide, sa première nouvelle : Un nouvel amour. En août, Les Cahiers du mois publient un conte fantastique Entrée du désordre. En octobre la collection d’avant-garde Cinario offre aux premiers cinéphiles un synopsis inédit Un suicide.

Un Nouvel Amour - 1925

Quatre œuvres immédiatement remarquées. Dès le mois de juin Paul Morand avait salué le nouveau venu : " il y a des années que je n’ai adhéré à un auteur avec autant de contentement ". En août Max Jacob lui écrit " vous êtes un homme nouveau : c’est le plus grand éloge qu’on puisse faire à un artiste ". Albert Thibaudet et Edmond Jaloux confirment la révélation d’un grand auteur. " Comme je voudrais vivre dans votre Ville anonyme ! au moins la moitié de ma vie !... " confie Joseph Delteil. Et Joseph Kessel : "ton talent me rendrait un peu envieux si je t’aimais moins ".

" On fait grand bruit, en de certains milieux, autour de ce roman, et n’ai-je pas lu qu’il apporte la révélation d’un talent considérable ! " s’énerve Firmin Droz, le critique autoritaire de l’Eclair. " J’ai souvent pensé, au cours de cette lecture exigeante, à certains passages de la Saison en enfer de Rimbaud " confesse dans l’Europe nouvelle le non moins terrifiant feuilletoniste Pierre Bonardi.

C’est également pour Beucler l’année où se nouent des amitiés indestructibles : Léon-Paul Fargue, Max Jacob, Jean Cocteau, Paul Morand, Joseph Kessel et Jean Giraudoux. Il adhère aussi au club informel des " Moins de trente ans " que vient de créer le dessinateur Pol Rab et qui ne comprend que des membres cooptés à l’unanimité. Un aréopage qu’on ne peut dénombrer aujourd’hui sans un certain ahurissement : Joseph Kessel, Pierre Bost, Robert Desnos, Steve Passeur, Armand Salacrou, Marcel Achard, Georges Auric, Henri Jeanson, Jean Fayard, Pierre Lazareff, Emmanuel Bove, Marcel Aymé, Claude Aveline, Pierre-Jean Launay, Julien Duvivier, Carlo Rim...

 

Dans ce Paris de 1925, dans ce monde en fusion, Beucler donne libre cours à une dévorante ardeur. Il mène avec Fargue une existence de noctambule. Avec Max Jacob il fera longtemps les promenoirs de music-hall, et sera l’un des meilleurs chroniqueurs dans ce domaine qui n’est pas encore banalisé. Il est aussi l’un des premiers critiques du cinéma d’avant-garde, et s’enthousiasme pour Eisenstein et pour Charlie Chaplin. Avec Alfred Fabre-Luce il fait un long parcours en Russie soviétique puis à son retour donne des conférences et publie deux ouvrages : Paysages et Villes russes et Caucase.

Mais il garde le temps de poursuivre son œuvre et s’isole souvent dans sa maison près de Montbéliard. Il publie, en deux ans seulement, une dizaine de nouvelles et quatre romans, dont l’un va connaître un succès considérable : Gueule d’amour.

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En 1926, Charlie Chaplin confie à Maurice Martin du Gard, alors directeur des Nouvelles Littéraires, la tentation qu’il a eue de transposer ce Gueule d’amour au cinéma, parce qu’il trouve que Beucler est " le meilleur ami que le hasard ait en France ".

 
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1929 - 1934
Les années fastes
Du cinéma au grand reportage

 

Beucler aime aussi la littérature des autres. En 1929, il révèle Saint-Exupéry au public en préfaçant Courrier Sud. Chez Gallimard il lance une collection, Les Rois du Jour, où il édite Paul Morand, Pierre Mac-Orlan, Joseph Kessel. Il fait connaître la jeune littérature soviétique, et en 1930 traduit Rastratchiki de Valentin Petrovitch Kataev. Dans la foulée, il traduit aussi Dostoïevski par sa femme (Anna Grigorievna Dostoïewskaïa), dont l’édition sera enrichie d’une étude de Sigmund Freud, et se fait même historien avec une biographie d’Ivan le Terrible, dont l’analogie avec Staline le frappe.

André Beucler est toujours à la recherche de " plus encore ". Il n’y a pas de limite à sa curiosité et à ses appétits. Mais, au début des années 30, le voilà soudain marié et père. Aussi saisit-il l’occasion de concilier l’aventure et la sécurité, en acceptant, sur l’invitation de Raoul Ploquin, de s’intégrer à l’équipe française d’une formidable machine qui ambitionne de produire un cinéma européen : la U.F.A. à Berlin.

Il inaugure cette expérience en écrivant les dialogues et en collaborant au scénario du premier film réalisé en trois versions avec trois distributions : allemande, anglaise, et française. Ce sera IF1 ne répond plus, tiré du roman de Siodmak, et tourné en mer Baltique avec, pour la version française, Charles Boyer, Pierre Brasseur, Jean Murat et Danièle Parola.

Si la gigantesque production d’IF1 ne répond plus, véritable paradigme des films à la James Bond, constitue une étape dans l’évolution du cinéma, les autres films auxquels Beucler participe n’ont pas marqué l’histoire du cinéma d’auteur, mais furent, pour lui, le moyen de bien vivre. A travers sept films, IF1 ne répond plus, Adieu les beaux jours, Tambour battant, Le Secret des Woronzeff, Princesse Czardas, Nitchevo et Bar du sud, Beucler fut successivement ou simultanément adaptateur, scénariste, dialoguiste, co-réalisateur. Ce fut encore l’occasion de collaborations qui devinrent des amitiés durables : Charles Boyer, déjà rencontré sur les bancs de la Sorbonne, Pierre Blanchar, Jean Gabin, Brigitte Helm, Lilian Harvey, Mireille Balin, Ginette Leclerc, Françoise Rosay, Meg Lemonnier, Lyne Clevers, Madeleine Ozeray...

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Le cinéma va pourtant laisser à cet homme infatigable le temps de joindre le plus d’utile au maximum d’agréable, et de ne pas rompre ses attaches avec la presse. L’inquiétude devant cette Allemagne qui bouge, l’évolution du peuple russe pour laquelle sa tendresse est congénitale, sa curiosité attentive des problèmes insolubles de l’Europe centrale, contribuent à faire de lui un des grands reporters de la presse dans les colonnes de Marianne principalement, qui appartient à Gallimard et qu’a créé son ami Emmanuel Berl, mais aussi de l’Intransigeant, de Candide ou de Paris-Soir.

Jean Prévost écrit de lui qu’il est " l’un des journalistes les plus sobres, les plus pondérés, les plus pénétrants qui nous aient peint l’Allemagne de Hitler ", et Pierre Bost qu’il " dit ce qu’il voit, sait voir, aime voir juste et possède cette écriture directe, drue, riche en formules éclatantes, qui semble faite tout exprès pour les récits de voyage, pittoresques comme des films et rigoureux comme des rapports ". Beucler multipliera surtout les avertissements face à l’escalade du nazisme. Peut-être cette activité débordante — à laquelle se serait ajoutée, a-t-on dit, celle de consultant de cabinets politiques (notamment celui de Daladier) qui l’ont malheureusement peu écouté, lui a fait négliger sa prolixité romanesque. En revanche, elle l’obligera un jour à quitter précipitamment l’Allemagne, où il est considéré à partir de 1934 comme indésirable (il figurera sur la fameuse liste Abetz).

 
 
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1934 -1939
Le recueillement
L’essayiste et le traducteur

 

Frustré dans sa boulimie, de surcroît en instance de divorce, il revient dans un Paris moins pétillant. Il y retrouve tout de même de grands amis et ses vieilles amours de la flânerie constructive : Fargue toujours, et Kessel bien sûr, mais aussi Lucien Fabre, Matila Ghyka, Marie Laurencin, Louis Jouvet, et même l’insaisissable Giraudoux.

Il se retire un peu plus souvent dans sa tour d’ivoire franc-comtoise, à Bondeval près de Montbéliard. Il y travaille à la première étude biographique consacrée à Hitler, qu’Emmanuel Berl lui a demandée pour les Editions Nationales tout juste créées par Gustave Tronche (1937), et à une nouvelle traduction du russe, consacrée à l’épopée écrite par un jeune écrivain sur la Terreur rouge dans la Sibérie de 1919 (La Horde de Chichkov).
 
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Il ne participe pas à l’adaptation de son roman Gueule d’amour que Jean Grémillon porte à l’écran en 1937 avec Jean Gabin dans le rôle titre. Il veut surtout mener à bonne fin un très grand roman complexe auquel il tient beaucoup et qui est en quelque sorte sa première " somme ", son premier coup d’œil en aval : La fleur qui chante. Roman monumental, à clefs, fort malheureusement livré aux libraires à un moment tout à fait inopportun pour être remarqué : en septembre 1939 ! La guerre qu’il sentait inévitable est déclarée.
 
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Première partie

Troisième partie


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