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Alors
elle joue à n'être qu'elle-même. Une femme, c'est bien autre chose qu'une
femme. Une femme n'est jamais seule. Elle le sait. C'est toute la terre
et ses énergies, ses bontés, ses ondes, ses secrets jaillissants. Une
femme, c'est l'inconscient de ce monde où les hommes passent leur temps
à tout détruire pour tout reconstruire sans rien changer. S'ils avaient
pu, ils auraient changé la femme, car ils ne se privent pas d'anéantir
ce qu'ils adorent, en hurlant de plaisir. Un beau matin, il n'y aura plus
de but. Elle, au moins, est sûre de son attente, comme d'un feu qui l'éclaire
toute.
Puis, un soir, celui qu'elle aimait retrouva dans les ruines de la vie
l'appartement sous les toits, toujours fidèle, immobile, tel qu'un judas,
une émotion, un secret... Mais sur les marches de l'attente, et pure comme
le silence dans lequel il la savait réfugiée, heureuse d'avoir triomphé
de tout ce qui l'avait distraite, sa fiancée n'était plus qu'une statue.
Une vraie statue. Un monument impérissable qui ne demandait qu'un peu
de cette admiration que les barbares eux-mêmes accordent malgré eux et
sans malice à ce qui ne se déjuge pas.
1945
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